Sommairel'Année polaire 2007-2008 Paul-Émile Victor
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Je pars dans le vent et
probablement vers le néant, mais si ce néant s'avérait être trésor, je me
battrais contre les puissances des ténèbres pour faire entendre ma voix,
enrichie de cette expérience nouvelle, pour vous dire la promesse que j'aurais
arrachée au silence.
Tel est le testament poétique d'un homme exceptionnel, un de ces hommes si rares qui ont su rallier l'unanimité de tous autour de leur nom, fédérer toutes les ardeurs, déplacer des montagnes et qui laissent aujourd'hui un héritage immense. Tel a été Jacques-Yves Cousteau, tel est Paul-Émile Victor... Qui encore en France, et dans le monde, peut douter que la recherche scientifique et la présence de la France dans les contrées polaires seraient ce qu'elles sont aujourd'hui sans celui qui a été surnommé PEV ? Il était donc inconcevable de réaliser un site sur la Terre Adélie sans consacrer une page à cet homme exceptionnel, qui a, de plus, été philatéliste à ses heures et a possédé une riche collection de plis de Terre Adélie, qui a malheureusement été détruite par le cyclone qui a détruit son île de Motu-Tane, dans le Pacifique, où il s'était retiré, sa tour d'ivoire d'où il regardait le temps passer. Paul-Émile Victor est né à Genève en 1907. Il passe sa jeunesse dans le Jura auprès de ses parents petits industriels (ils ont une fabrique de stylos à Lons-le-Saunier) à rêver de grands voyages et d'aventures, comme tous les enfants de son âge. Il suit avec attention les exploits des aventuriers et des découvreurs du début du siècle. Cette période de sa vie est très bien décrite dans un de ses livres les plus connus "La Mansarde". Puis vinrent les études d'ingénieur à l'École Centrale de Lyon, où il passe une licence ès sciences, et un certificat de lettres. Après ces études lyonnaises, il rejoint sa passion de toujours et suit les cours de l'Institut d'Ethnologie de Paris, où il s'intéresse plus particulièrement à la civilisation polynésienne. C'est alors qu'il abandonne définitivement la voie qui lui semblait dévolue, la reprise de l'entreprise familiale de fabrication de stylos. Peu après, il fait la rencontre qui va déterminer le reste de sa vie. Il fait la connaissance du docteur Jean-Baptiste Charcot, et se consacre dès lors à l'Arctique et à l'ethnologie de ses peuples.
A 27 ans, il embarque à bord du navire scientifique de Charcot, le célèbre "Pourquoi-pas ?" avec trois compagnons (le Suisse Fred Matter et les Français Michel Pérez et Robert Gessain). Tous les quatre vont être déposés par le bateau sur la côte est du Groenland, à Ammassalik, et où vit une communauté d'eskimos, et ils vont y vivre pendant un an parmi les eskimos, afin de le étudier.
En 1936, PEV est de retour au Groenland, toujours avec M. Pérez et R. Gessain, mais aussi avec le suédois Eigel Knuth. Ils entreprennent la périlleuse traversée du Groenland d'ouest en est lors d'un raid à traîneaux à chiens de plus de 800 kilomètres sur la calotte glaciaire. Paul-Emile Victor ne rentre pas en Europe, mais reste à nouveau parmi ses amis eskimos, et passe cette fois plus d'une année au village de Kangerdlugssuatsiaq, intégré parmi les habitants qui l'ont adopté comme un des leurs. Il épouse même une des filles du village, selon les rites locaux. Il mène ensuite des missions en Laponie dans les années 1938-1939. Puis arrive la guerre, et l'engagement de PEV dans les forces aériennes américaines, après sa démobilisation de la Marine Nationale en 1940. Il apporte aux forces armées américaines sa connaissance des milieux polaires, et commande une escadrille de sauvetage basée en Alaska, chargée de rechercher et de secourir les équipages d'avions perdus pendant les transferts vers les zones de combat. Après la guerre, il participe à la création de ce qui sera l'œuvre de sa vie : les Expéditions Polaires Françaises. Il les dirigera jusqu'à sa retraite, en 1976, et mettra à leur service son extraordinaire don pour l'organisation et la collecte de subsides. Il va dès lors sans relâche se battre afin de maintenir et développer les missions et les expéditions en Arctique et en Antarctique. C'est à lui qu'on doit, sur la proposition des "trois du Spitzberg", la reprise des missions en Terre Adélie en 1949, et par là, la réaffirmation de la souveraineté française. Il prend dès lors du recul par rapport au terrain, et ne participe plus qu'épisodiquement aux missions. Il dirige des campagnes au Groenland entre 1957 et 1960, et effectue quelques passages en Terre Adélie lors des campagnes d'été. Par contre, il s'implique à fond dans tout ce qui est préparation des missions, relations avec les instances françaises et étrangères, relations scientifiques.
Écologiste visionnaire, il prend très tôt conscience de la nécessité de préserver notre environnement, et de l'importance de maintenir les régions polaires, si fragiles, à l'abri des convoitises. Il fonde en 1974 un groupe pour "la défense de l'homme et de son environnement", auquel participent d'autres Français visionnaires et mythiques, Cousteau, Tazieff et Bombard. En 1976, à près de 70 ans, Paul-Émile Victor prend sa retraite. Il s'installe sur une petite île proche de de Bora-Bora, le Motu-Tane (île de l'homme). Il rejoint ainsi son rêve d'adolescent, en compagnie de sa seconde épouse, lui qui disait "avoir toujours eu horreur du froid..." ! En 1987, pour ses 80 ans, il se rend pour la dernière fois en Terre Adélie, accompagné d'enfants. Il passe dorénavant son temps entre Paris, où il participe à des conférences ou des réunions (parfois même il participe à des réunions philatéliques), et la Polynésie, où il peint, dessine, écrit. Il milite pour la création de l'Institut Français pour la Recherche et la Technologie Polaires (I.F.R.T.P.), qui sera créé en 1991 et basé à Brest, sous la direction d'une autre figure polaire : Claude Lorius. Les E.P.F. vont alors intégrer l'I.F.R.T.P., ce qui ne se fera pas sans mal... Paul-Émile Victor est mort le 7 mars 1995, et, selon sa volonté, il a été inhumé dans l'Océan Pacifique selon le rituel de la Marine. Il avait préparé longuement ce moment, au travers de ses méditations, et avait même réalisé un dessin qui devait faire office de faire-part. PEV a laissé une oeuvre très riche, notamment par ses livres et ses dessins, très connus des philatélistes. En voici une petite sélection...
En hommage à PEV, l'Institut Polaire français a été baptisé Institut Polare Français Paul-Emile Victor. A l'occasion du 10e anniversaire de la disparition de PEV, les TAAF ont émis le 7 mars 2005 un timbre à 0,50 € lui rendant hommage.
Un des fils de PEV vient de créer un site sur son père : www.paulemilevictor.fr Bibliographie : Aventure Esquimau (Éditions de l'Aube)
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